Greffe et porte-greffe

Le printemps qui s’annonce fait repartir la sève. Rien de stupéfiant dans cette remarque sauf qu’elle va nous servir pour évoquer les arbres fruitiers, les greffes et les porte-greffes pour introduire notre sujet : " Le judaïsme, porte-greffe du christianisme". En marche vers la Passion et la Résurrection, ces quelques lignes sont susceptibles de nous aider à voir comment le premier (le Judaïsme) prépare le second (le christianisme) ou, inversement, le second est l’accomplissement du premier. En clair, le Judaïsme a servi de porte-greffe du christianisme ; c’est par lui que la sève monte.

Tous les croyants en Dieu descendants d’Abraham par la foi savent qu’ils sont invités soit le vendredi (à la mosquée), soit à la synagogue (le samedi), soit à l’église (le dimanche). Répondre à une invitation c’est se rendre à une audience privée. Eh ! oui, les uns après les autres, Dieu nous invite en audience privée. Ainsi chaque dimanche, c’est notre tour.

En audience privée

Au cours de cette audience en présentiel (1) et en cœur à cœur, toutes nos dimensions sont prises en compte par le Seigneur Dieu, la dimension personnelle, intime, avec notre prière intérieure,
et la dimension communautaire de toute l’assemblée. Les Juifs accompagnent ce face à face avec Yahvé par des mouvements du corps : balancements d’avant en arrière, trois pas en avant pour symboliser l’entrée en prière etc . . . Quant à la mosquée où les fidèles n’entrent que pieds nus par respect pour ce lieu très saint (2) admirons deux attitudes de base : les rangs serrés des hommes en prière et leur prosternation front contre sol sur le tapis. Il y a là un très haut degré d’humilité devant le Tout-Puissant, une soumission d’amour et une dimension d’union universelle à voir dans tout l’ensemble serré et recroquevillé. Certains exégètes y voient aussi l’arrondi du fœtus comme une prise de conscience de son origine.

Il est épanouissant de constater que notre liturgie chrétienne (la messe) se greffe impeccablement sur la liturgie juive et se trouve ainsi alimentée de sa sève vivifiante pour croître d’elle-même dans le christianisme et produire avec Jésus les fruits nécessaires pour rejoindre Dieu :"Par Lui, avec Lui et en Lui, à Toi Dieu le Père Tout Puissant dans l’unité du Saint-Esprit etc . . ." Mais n’allons-pas trop vite et arrêtons-nous d’abord à la liturgie de la Parole (1ère lecture de la messe). Être appelé à "Monter à la Torah" est un très grand honneur. Il s’agit de monter les quelques marches qui permettent d’atteindre l’Arche Sainte pour en retirer avec grand respect le rouleau des Ecritures Saintes (Pentateuque), de le montrer ostensiblement à l’assemblée et d’en lire à haute voix de longs passages. Jésus l’a fait. Nous le faisons à partir de l’ambon, lieu symboliquement surélevé dans nos églises pour proclamer la Parole de Dieu.

(suite de cette étude la semaine prochaine)

Hilaire Ferchaud

(1) Ce mot n’existe que depuis peu dans le langage courant ; il ne figure dans aucun dictionnaire
(2) Dans la scène du buisson ardent, Dieu dit à Moïse :"N’approche pas d’ici ! Ôte ta sandale car le lieu que tu foules est saint" (Exode - Chapitre 2, verset 5)