La porte

Il n’est pas courant de voir un sujet traiter de "la porte". Qu’y a-t-il de plus commun qu’une porte ? Or, avec un virus qui tue, un confinement qui enferme et un vaccin incertain, nous avons peut-être bien le moral "dans les chaussettes" avec le sentiment d’être à la porte de tout, sur le seuil de tout, prêts à sauter sur tout sauf que . . . la porte est fermée ! Il ne nous reste plus qu’à la regarder ! Cela peut paraître stupide mais c’est pourtant à cela que je vous invite.

Dressée verticalement sur un seuil, notre porte d’entrée protège contre les intempéries et les intrusions inopportunes . Mais en pivotant sur ses gonds, elle qui était un rempart devient accueil. "Entrez donc, ne restez pas dehors !" Et en l’ouvrant bien grand elle ouvre aussi notre intérieur, notre espace intime. Tous les gens connus peuvent entrer ; quant aux inconnus c’est peut-être par l’entrebâillement que nous allons leur parler : "Non merci, je n’ai besoin de rien !" Connus ou inconnus ne sont pas frappés du même sceau !

A l’instant où le visiteur franchit le seuil, il passe du domaine public au domaine privé mais quelques pas auparavant, peut-être a-t-il déjà admiré un paradis de fleurs comme un avant-goût d’accueil. C’est donc le cœur léger que ce visiteur, cet invité d’un soir peut-être, ou même toute une famille, s’apprête à sonner et à offrir à leurs hôtes leurs précieux cadeaux. De la même manière, pour accéder à nos églises le cœur léger alors que carillonne l’appel des anges, nous traversons un paradis : le parvis. Paradisium en latin = paradis (1). "Eh ! oui, c’est un vrai paradis chez vous !" s’exclament les invités dès que la porte s’ouvre.


Certains parvis sont surélevés, rendus impossibles aux voitures et comportent bon nombre de jolies vasques pour l’accueil. A l’instant même où pour entrer dans l’église, je lève le pied pour ne pas heurter la barre de seuil, je passe moi aussi du domaine de la terre au domaine du ciel, deux domaines qui ne sont pas incompatibles. Au contraire : ils s’interpénètrent. Travaux, saisons, loisirs, animaux . . . sont là, sculptés sur les tympans de nos églises romanes. Le Christ, la Vierge Marie, les apôtres, les saints y ont été ajoutés à l’époque gothique.

Nous voici dans le hall de la maison où l’on nous accueille en prenant nos vêtements d’hiver. "Passez donc au salon." Dans la Maison de Dieu, c’est dans le narthex que nous pouvons secouer le parapluie, nous réajuster. Dès que nous abordons la nef, l’équipe d’animation nous accueille et nous invite à nous purifier. Dès lors, le cœur léger, nous montons vers la table dressée, sous le regard des saintes et des saints qui proposent leur "conduite accompagnée". En musique s’il vous plaît ! Qu’est-ce qui nous vaut tant d’honneur ?

Hilaire Ferchaud
(1) Magnifique clin d’œil à l’Ancien Testament puisque le Temple de Jérusalem au temps de Jésus comportait plusieurs cours intérieures appelées "parvis" : parvis des hommes, parvis des femmes, parvis des prêtres . . .

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